Arrivée à la Cour

La marquise effectuait sa promenade matinale, comme il était de coutume. Seulement, ce matin-là, elle avait grand besoin de distraction pour lui faire passer les mauvaises pensées qui l'avaient travaillé toute la nuit durant. Ainsi, les jeunes filles composant sa suite s'affaireient autour d'elle, habillées simplement. En s'approchant, on pouvait constater qu'elles n'étaient vêtues que de leurs jupons et de leurs corsets. Toutes étaient entièrement de blanc et les cheveux détachés. Ainsi, elles ressemblaient à des anges grapillant autour de la plus belle femme de France. En effet, Athénaïs les regardait de son regard doux et maternel tout en évoluant au-travers des allées. Le soleil était au rendez-vous, contrastant avec la pluie tombée la nuit laissant de ci et là quelques flaques claires et froides.
Les filles, quelque peu envivrées encore de leur nuit mouvementée en la présence de la marquise, crièrent de joie à la vue de Guy qu'elles virent de loin et coururent à son encontre, l'entourant avec joie et relevant leurs robes pour mieux lui tourner autour en espérant que ce dernier puisse à l'envolée apercevoir un morceau de cuisse dorée.
Madame de Montespan, plus digne, les rappela à l'ordre. sans se faire prier, toutes les jeunes filles s'entassèrent derrière leur maîtresse tout en regardant avec envie la carrure magnifique du nouvel homme. bientôt, les paris s'ouvriraient. Laquelle s'entre elles l'aurait donc en premier ?
Athénaïs le toisa de haut en bas avant de sortir son ééventail. Le roy n'ayant pas passé la nuit en sa présence, elle n'avait pas eu la chance d'être prévenue des nouvelles arrivées à Versailles. Maintenant que l'homme était devant lui, il fallait lui engager la conversation.

-Madame de Montespan née de Rochechouar Mortemart, Marquise à Versailles. A qui ais-je l'honneur ?

Vetue d'une magnifique toilette violine et brodée du tissu le plus honereux sur le contour de son corsage, la grande dame se tenait grande et fière. Elle aimait à montrer dès le début qui régnait en reine sur le palais qui n'était que débauche depuis son arrivée. S'il tenait à rester au palais, il fallait qu'il lui plaise à elle, mais surtout à une de ses courtisanes qui s'exaltaient de plus en plus sur le vicomte. L'homme semblait cependant fort distant, et si femme il avait, fort fidèle.
Sentant sa personnalité à des lieues, la marquise se promit de faire de cet homme un des seigneurs de la débauche. D'après tout, le Riy n'était avant son arrivé qu'un agneau de la plus tendre espèce. Maintenant, il devenait pire même que sa favorite...

Guy n'avait jamais vu un vol d'oiseaux aussi magnifique. Il n'aurait pu dire de quelle espèce il s'agissait, mais leur nombre l'avait impressionné à un tel point qu'il ne put plus détacher son regard du petit nuage noir qui commençait à disparaître de l'horizon. Il entendit soudainement des cris, mais ne réagit que quelques secondes plus tard, lorsque qu'une bande de jaunes filles toutes vêtues de blanc, qui l'entourèrent en dansant et en agitant leurs robes. Le Vicomte put voir quelques morceaux de peau et de jambe. Quel accueil ! Guy sourit d'étonnement, puis aperçut une sublime créature, qui venait d'appeler les filles qui vinrent la rejoindre. Une grande dame, sans aucun doute. La femme agita un éventail et se présenta. Il sursauta intérieurement. Il avait eu connaissance de rumeurs qui couraient chez les nobles bretons, qui disait d'une certaine Madame de Montespan qu'elle était l'une des favorites du Roy ! Quel honneur de la rencontrer en tout premier lieu ! Guy tira son chapeau et esquissa une gracieuse et profonde révérence, qui traduisait quelque peu une expérience militaire.

Madame, je suis Guy Lusignant de Mont Cavalière, Vicomte de Châteaulin, ancien Commandant des armées de Sa Majesté et tout juste arrivé à Versailles.

Il se redressa, et garda son chapeau dans sa main et posa son autre paume sur la garde de son épée. La femme dégageait une forte impression de puissance. Ce qui expliquait facilement la docilité des filles dans son dos et l'aisance qu'elle avait à se faire obéir d'elles. Ces mêmes filles commençaient d'ailleurs à s'énerver, et sautaient presque sur place. Certaines regardaient Guy avec un long sourire, qui mettait le Vicomte mal à l'aise et lui faisait tourner le regard.

C'est un Honneur sans nom d'avoir croisé votre chemin, Madame. Mon but, en venant m'installer à la Cour, était de rencontrer le Roy, mais votre présence ici devant moi égale bien la sienne. Savez-vous s'il est au courant de mon arrivée ?

Il parlait d'une voix calme et posée. Il était certes fier d'avoir eu à croiser le chemin de la Marquise, et se promit d'aller en remercier le Très-Haut, une fois qu'il aura pris possession de ses nouveaux appartements.

Je toisais l'homme de haut en bas une fois de plus. Il avait l'air bien élevé et semblait avoir eu une certaine éducation qu'il ne quittait pas d'une semelle. Malheureusement, il était de mon avis que les enfants doivent à un moment ou un autre établir eux même leurs règles et agir selon leur volonté. Un homme ne peut pas être aussi vertueux que ce qu'il le montre tout de même ?
Le Roy ? Ah oui, je l'avais oublié, celui-ci ! Il était bien temps que je le retrouve. Il était sans nul doute parti passer la nuit je ne sais où et de toute façon je m'en moquais bien. Toujours était-il qu'il n'avait pas eu le temps de me dire les derniers potins, et je me sentis sans voix devant un simple vicomte quand ce dernier me demanda sile Roy était au courant de sa venue. je ne voulais Ô pas paraître ridicule dès la première impression, et je pris contenance en faisant un de mes sourires crucialement amusés à l'adresse des filles qui gloussèrent sans raison. Des braves pantins que voilà ! Je me sentais renaître des forces.

-Mais bien sûr, Cher Monsieur ! Le Roy a dû sans nul doute recevoir le mot de votre arrivée, toutefois, il est fort possible qu'il ne l'aie pas en tête ! Voyez-vous, il a des travaux bien plus importants...

J'espérais avoir bien répondu. Avec un peu de chance, mes paroles avaient transmi mon mal aise apaisé au jeune arrivant. J'étais curieuse de connaître ses armes, et je ne doutais pas que sous son allure enfantine encore et ses habits de soie se cachaient tous les atouts nécessaire à la survie d'un homme en Versailles. Je ne doutais d'ailleurs pas qu'une fille de ma suite m'en fasse dans peu de temps les éloges. Aimait-il les brunes ou les blondes ?

-Je doute qu'il soit disponible pour le moment. Il doit à cette heure être en conseil avec ses ministres. Aucune chance de l'aborder. Y a-t-il des pièces dans Versailles qu'il vous serait plaisant de visiter ? Je suis certaine que mes suivantes seraient ravies de vous mener voir le palais !

A mes mots, les jeunes filles sautèrent de plus belle, priant intérieurement d'être choisie. Je n'avais pas lâché mon fier éventail, et maintenant, je savais mon sourire aussi grand que brillait le soleil en cet instant.

Le Roy n'est pas disponible. Guy s'en était douté, il l'avait même prévu en franchissant les grilles du château. Sa fonction au sein du gouvernement lui prenait beaucoup de son temps. Il acquiesa, il le verrait bien plus tard. Rassuré par le fait que Sa Majesté ait été averti de son arrivée, la Vicomte réfléchit sur les dernières paroles de la Marquise. Il plissa les yeux. Il savait déjà quelle réponse il allait donner, mais c'étit la Marquise elle-même qui l'intriguait. Fière, et manipulatrice. Il en avait rencontré bien souvent à Barcelone, des femmes de ce genre, et savait les reconnaître. Il esquissa un petit sourire gêné en voyant les filles sauter et pousser des petits cris de joie. Elles étaient la preuve que la favorite du Roy possédait une certaine emprise sur les esprits. Ces filles lui rappelaient de dociles animaux attachés à leur maîtresse... Admirable, cette Marquise !

Pardonnez-moi, Madame, mais je pense que je vais en tout premier lieu me rendre à mes appartements. Le voyage depuis Paris m'a épuisé. J'accepte toutefois que l'une de vos charmantes jeunes filles me guide ; sinon, je n'aurais de cesse de me tromper.

Le Vicomte chatouilla l'une des filles de ses yeux. Elle était jolie, très jolie même. Mais Guy désirait plus un guide qu'une plaisante compagnie. Ses expériences en femmes ne s'étendaient qu'à quelques demoiselles en Espagne et en Alsace. Il n'aimait pas se servir des femmes et en abuser. mais la Marquise semblait prendre goût à ce que les filles soulèvent un peu leurs robes pour attirer son regard. Il décida de jouer le jeu.

Je serais très charmé d'avoir à être accompagné par l'une de vos suivantes. J'espère vous revoir très vite, Madame. Ce que, je n'en doute pas, se produira sous peu.

Il se redressa, un léger sourire fendu sur son visage. Il posa ensuite ses deux mains sur le pommeau de sa canne. Un petit vent fit voleter sa cape, découvrant le pistolet fourré dans son dos. D'un coup de bras, il rabattit son habit, et esquissa un nouveau sourire.

Je toisais la jeune fille derrière moi, une suivante pourvu d'un fort joli minois. Il semblait que le jeune vicomte avait jeté sur elle ses vues, et elle s'en trouva fort aise. Ce brave homme aurait de quoi s'occuper un peu, malheureusement, il n'avait pas choisie la plus intelligente et je gageais qu'au bout d'un certain temps il viendrait en pleurant me demander de la reprendre au plus vite. L'amusement serait à la hauteur, et j'aurais pour quelques semaines le loisir de faire parler mes aras et faire mimer mes ouistitis. Il me faudrait même trouver un gorille pour qu'il refasse les grimace de certains courtisans, malheureusement, l'animal allait effrayer les pintades, non pas celles de la basse cour, mais celles de la haute car elles avaient la réputation d'être bien plus sottes !

-Damoiselle Ylania ! Faites donc visiter les lieux à ce... Cet homme. Tâchez de le contenter, et prouvez-nous que vous êtes capable de quelque chose !

Sur ces paroles, je partis, l'éventail en main, tout en écoutant les compliments que me lançait de loin ce Jean de la Fontaine. Ses travaux dans les labyrinthe étaient enfin terminés, et il tentait en vain d'entraîner une des suivantes à l'intérieur afin de leur faire à chacune une visite personnelle dont il avait le secret.

Ylania était une jeune fille allemande dont les parents scrupuleux l'avaient donné au Roy contre une signature d'alliance avec la grande famille des Von Holleinstein Bifield. N'ayant rien à faire d'une jeune femme, mais l'acceptant sous les demandes insistantes d'Athénaïs, il céda aux demandes et l'offrit à sa favorite. Cette dernière la placa parmis les autres et en fit un objet de séduction pour les nouveaux arrivants. La marquise se lassait tant des longues journées à la cours Royale qu'elle se trouvait des amusements quelque peu déroutants, mais elle seule semblait ne pas se rendre compte de ses manières peu catholiques... Elle et ses partisans.

-Damoiselle Ylania Von Holleinstein Bifield, pour vous accompagner, messire...

La jeune fille émit une profonde révérence et ne se releva pas, attendant que ce dernier témoigne d'un quelconque geste de salut.